Crédit: Images réseaux sociaux.

Tchad : l'école, lieu d'apprentissage ou de dépravation des mœurs ?

Impacté par plusieurs problèmes tels que les conflits et grèves répétitives depuis l’accession à l’indépendance en 1960, le système éducatif tchadien n’a pas connu une réelle évolution et continue de souffrir sans que les plus hautes autorités s’engagent résolument à trouver une issue.

Djimrassem Thalès, enseignant-chercheur à l’université de N’Djaména, avait déclaré : « le système éducatif tchadien est dans un état de détérioration, de décadence, pour ne pas dire de décomposition ».

Dans cet article, nous allons se baser essentiellement sur le nouveau comportement extravagant des élèves de différents établissements scolaires de la ville de N’Djaména.

► À lire aussi : Le système éducatif tchadien : une crise sans fin ?

Tout d’abord, c’est quoi l’école ?

Si l’on doit se refaire à la définition de l’école, il s’agit d’un lieu d’apprentissage permettant d’accueillir des personnes (appelés élèves) afin de leur dispenser un enseignement de manière collective. C’est donc un temple de savoir, qui regorge plusieurs règles de bonne conduite.

Mais, si l’on devrait pousser la réflexion, au-delà de cette définition, est-ce que au Tchad l’école est-elle un lieu d’apprentissage ?

Ce qui se passe aujourd’hui dans les différents établissements scolaires prouve à suffisance que l’école au Tchad, est dans un état de déperdition. Pas besoin de mener une longue investigation pour se rendre à l’évidence, il suffit juste d’aller dans une école durant les heures de pause pour constater réellement ce qui se passe.

Plusieurs autres raisons existent et qui mettent en cause la bonne marche de l’école au Tchad. On se pose la question, qu’est-ce que les élèves partent faire exactement dans les écoles ?

► À lire aussi : Depuis quelque temps, on constate dans certains établissements scolaires à N’Djaména, la capitale tchadienne, un type de comportement non désiré, nuisible et hostile qui touche particulièrement le corps enseignant.

Un usage irresponsable des réseaux par ces élèves

Sur les réseaux sociaux, principalement sur Instagram, plusieurs pages ont été créées portant les noms de quelques établissements scolaires publics et privés de la ville de N’Djaména. Ces pages qui sont souvent animées par des élèves, diffusent des images qui ne laissent personne indifférent.

Une vue des élèves avec un habillement militaire.

► À lire aussi : le maintien des jeunes filles à l’école reste un défi majeur en Afrique.

Des filles avec des lunettes sombres, d’autres avec des armes en main.

Sur Tiktok, le constat est encore pire, puisque là-bas c’est le QG pour se vanter de toute sorte de publication d’injures, de violence dans les écoles, de port d’armes… Voilà l’image que ces établissements scolaires envoient sur les réseaux sociaux au Tchad ! Des administrateurs qui sont quasi – inexistants pour assumer leurs responsabilités. Dans cette situation, les enseignants qui devraient jouer un rôle crucial, ont décidé finalement de fermer les yeux.

Des parents qui ont perdu le contrôle de leurs enfants

Les parents jouent un rôle non négligeable dans la formation et l’éducation de leurs enfants. Avant d’envoyer leurs enfants à l’école, ils doivent les éduquer et leur inculquer la notion du respect, du savoir bien vivre avec ses camarades à l’école…

C’est à partir du moment où les parents ont réussi cette première étape que les enseignants pourront eux aussi réussir leur mission et développer l’esprit critique de ces derniers. Mais si déjà, les enseignants revoient des enfants avec une très mauvaise qualité d’éducation de base, la suite sera toujours mauvaise.

Des élèves avec de tenues militaires, armes en main et voiture teintées

Dans certains établissements scolaires privés à N’Djaména, un simple match de football interétablissements est synonyme des tirs d’armes à feu, des youyous sur les rues bloquant souvent la circulation.

Un élève qui se permet de venir à l’école avec une arme, pense quand même à son avenir ? Qu’est-ce que les parents s’attendent dans l’avenir en laissant leurs enfants se comporter ainsi ?

Vue d’un élève tenant une arme en main.

Que deviendra l’école tchadienne d’ici 10 ans ?

En 2017, précisément le 3 juillet lors d’une interpellation des ministres en charge de l’éducation nationale, une résolution a été adoptée par l’assemblée nationale de l’époque mettant en place une commission d’enquête parlementaire dans le but de trouver de solutions aux nombreuses questions qui minent le système éducatif tchadien. Cette commission dans son rapport d’enquête avait mentionnée que « Trop d’enfants sortent du système scolaire sans savoir correctement lire, écrire et compter ».

Mais jusqu’à présent, malgré cette enquête parlementaire et les efforts de plusieurs autres partenaires du Tchad, la situation n’a pas changé et continue de s’aggraver et l’on s’interroge sur les retombées de cette enquête. Il faut mentionner qu’au Tchad, les autorités sont surdouées en adoption des textes, mais quand il s’agit d’appliquer ces textes, c’est là où le problème se pose.

► À lire aussi : Justice au Tchad : qu’est-ce qui n’a pas marché ?

« L’allure où vont les choses actuellement, j’ai peur que d’ici 10ans on arrive à une situation catastrophique. En temps normal, c’est l’école qui prépare le type de société que nous voulons demain. Mais avec ces comportements, il est sûr que d’ici là, on aura une société rongée par ces maux que nous voyons à l’école aujourd’hui », a laissé entendre Leonard Gamaïgué, enseignant dans une école de nomades à la sortie Sud de la ville de N’Djaména.

► À lire aussi : Une école mobile pour les enfants nomades du Tchad

Les solutions

Les causes de ces problèmes sont connues, alors pour trouver de solutions, il est important de marquer une pause, pour revoir d’abord les autorisations accordées à l’ouverture en pagaille des écoles privées.

Aussi, de diligenter une mission pour voir exactement si ces écoles répondent aux normes et là on cite, le fait d’avoir un bon espace pour accueillir les élèves, une bibliothèque, de salles de réunion pour les enseignants mais surtout de voir quels types d’enseignants disposent ces écoles. Pour moi, une école qui ne peut même pas contenir les élèves durant les heures de pause n’est pas digne d’être une école.

Vue d’un élève tenant une chuchote avec un habillement militaire entrain de parler avec son enseignant.

«La solution que je propose toujours c’est la nécessité d’une profonde réforme dans notre système éducatif. Il faut que l’école s’adapte à l’évolution de notre temps. Dans un monde où les principes de liberté, égalité, justice et droit de l’enfant, il faut une formule qui tient compte de ces réalités mais en évitant de tomber dans le laxisme concernant l’autorité de ceux qui gèrent les écoles.

► À lire aussi : Djimrassem Thalès propose des pistes de solution pour redresser l’école tchadienne.

C’est vrai que les responsabilités peuvent être partagées à différents niveaux mais pour moi, le système éducatif en question qui le premier responsable et il n’y a que des changements radicaux en son sein qui peuvent inverser la trajectoire que notre société prend aujourd’hui », a déclaré Leonard Gamaigue que nous avons interrogé sur cette question.

Partagez

Auteur·e

leblogdemousse

Commentaires

Abdou
Répondre

Vraiment c'est très déplorable, n'accuse pas le gouvernement, l'éducation de base qui nous manque la famille.

Moussé
Répondre

Justement. Mais il faut aussi reconnaître que les responsabilités sont hautement partagées.